Marta ABBA

 

Comédienne et actrice italienne.

 

  

BIOGRAPHIE :

 

 

La vie de Marta Abba est indissociable de celle du grand dramaturge et metteur en scène de théâtre sicilien, Luigi Pirandello dans la fin de vie duquel, elle tint une grande place. De sa rencontre avec lui en 1923, jusqu’à la mort du « maître », en 1936, elle recevra 560 lettres à propos desquelles les historiens discutent encore de savoir s’il y eut ou non une grande histoire d’amour entre eux. On discute également de savoir si la grandeur de la star fut induite par le génie du “Maître” où si, à l’inverse, Pirandello fut illuminé par la Muse enchanteresse, lorsqu’il écrivit des textes pour elle.

 

Marta vient au monde à Milan. Elle est la fille aînée du commerçant Pompeo Abba et de son épouse, Giuseppina Trabucchi, une famille aisée, proche de la petite bourgeoisie milanaise. Célestine, qui deviendra plus tard Cele Abba à la scène, est sa soeur cadette de 6 ans. Après des études scolaires classiques, Marta étudie le théâtre à l’Académie théâtrale de Milan et débute sur les planches en 1922 dans une pièce dramatique d’Anton Tchekhov sous la direction de Virgilo Talli. Cette toute première prestation fait l’affaire des critiques qui la désignent comme une actrice impétueuse et passionnée, déployant une expression instinctive et exubérante. En clair, la jeune Marta dont la beauté ajoute encore à ses dons artistiques, se promet à un bel avenir car elle a toutes les qualités d’une grande dramaturge.

 

Ses apparitions suivantes à la scène exaltent encore les critiques qui se disent émerveillés par ses qualités scéniques. 1923 sera l’année décisive pour le déroulement de sa carrière, car Luigi Pirandello qui a justement lu le dernier article de Marco Praga, tombe lui aussi sous le charme de son expression intérieure puissante et la fait engager au théâtre d’Art de Rome dont il est le metteur en scène. Devient-elle la Muse fidèle du célèbre dramaturge sicilien dès ce moment là? Il n’importe. La jeune comédienne saisit sa chance et sera de la troupe dans les oeuvres futures du maître, telles que “Diana et la Tuda”, “L’amica delle mogli”, “Trovarsi”, et “Comme tu veux”.

 

Un beau visage harmonieux, le cheveu auburn, Marta est une belle femme qui comme Pirandello, brûle d’un feu intense. Mais à priori, seulement pour le théâtre. Dès 1926 s’instaure entre les deux passions, d’étranges correspondances épistolaires dans lesquelles elle l’appelle “Maître”. Ces lettres débordent largement le cadre professionnel. On y devine une grande intimité entre la comédienne et le dramaturge sans jamais pouvoir en fixer les limites. Leur collaboration au théâtre va durer jusqu’à l’été 1928 où elle se trouve en vacances avec sa mère et sa soeur Cele, à l’Hôtel des Thermes de Salsomaggiore en Emilie Romagne. Luigi lui adresse une lettre le 11 juillet 1928 dans laquelle il lui confie que sa "dernière lettre est froide, très froide".

 

Le pressentiment de Luigi Pirandello se confirma bientôt car leur collaboration arrivait à sa fin. Pendant ces cinq années de leur étroite collaboration, ils ont écrit ensemble une page qui restera immortelle dans l’Histoire du théâtre dramatique italien.

 

Cependant, durant cette même période estivale 1928, Marta met en place un projet. Celui de créer sa propre troupe théâtrale et elle en assume l’exécution dès son retour à Milan. Son nouveau répertoire est élargi à des auteurs comme Bernard Shaw, Gabriele d’Annunzio et Carlo Goldoni sous la direction de prestigieux metteurs en scène tels, Max Reinhardt et Guido Salvini. Malgré la diversité de son répertoire, la critique continuera de l’encenser comme la meilleure interprète du théâtre de Pirandello. Elle entame alors des tournées, d’abord en Italie, puis à l’étranger avec un égal succès.

 

De retour au pays, elle est sollicitée en 1933 par Alessandro Blasetti pour figurer comme actrice principale de son film “Il caso Haller” aux côtés de Memo Benassi et Isa Miranda avec cette particularité, que sa soeur Cele participera à ce tournage comme elle avait participé en 1927 à plusieurs pièces de théâtre aux côtés de sa soeur. C’était là une exigence de star bien compréhensible. L’année suivante, c’est Guido Bignone qui lui confie le rôle principal de son film “Teresa Confalonieri“ (1934) avec pour partenaire Nerio Bernardi. Ce furent les deux seuls films qu’elle tourna dans toute sa carrière essentiellement orientée vers le théâtre.

 

Pendant cette période de fascisme, la comédienne est reçue secrètement par Mussolini le 3 février 1933 pour une entrevue qu’elle racontera plus tard dans une lettre à Pirandello. Manifestement, Marta ne se fait aucune illusion sur le régime et sur le Duce qui cherche à verrouiller le répertoire théâtral sur les auteurs contestataires tel que Mann.

 

Lassée par l’emprise amoureuse platonique de Pirandello, la tragédienne décide d’une tournée en Angleterre au moment même où le «Maître» revient à Rome. Puis, elle s’embarque pour les Etats-Unis en 1937. Elle y fera la connaissance d’un riche industriel américain de la famille Millikin qu’elle épouse en 1938 à Cleveland et y restera jusqu’en 1952, année de sa séparation définitive d’avec son mari dont elle divorce dans la foulée. A son retour en Italie, elle décide de reprendre le théâtre mais elle ne retrouve pas le succès d’antan. Il est vrai qu’elle fut absente des scènes et des grands écrans une quinzaine d’années qui lui auront été fatales. Marta considère alors sa carrière comme terminée et elle se retire définitivement dans sa luxueuse Villa, qu’elle avait nommé “Troversi”  (du titre d’une pièce de Pirandello signifiant - se retrouver) à Fauglia, au Sud de Pise (Toscane). Pirandello avait sa villa à 10 km plus au Nord, à Collesalveti exactement.

 

Devenue âgée et malade (Marta ne se déplaçait plus qu’à l’aide d’un fauteuil roulant) elle passa les quelques années qui lui restait à vivre dans la ville thermale de San Pellegrino pour se soigner, loin du monde du spectacle. Elle s’éteignit d’une hémorragie cérébrale dans sa ville natale de Milan, le jour précédant son 88e anniversaire.

 

La Villa «Troversi», tombée en déshérence, (sans héritiers connus) est devenue un lieu de culte cinématographique des années 1900. En décembre 2004, les autorités communales et la Chambre de Commerce de Fauglia y organisèrent une grande manifestation culturelle intitulée «Le cinéma de Pirandello». Les deux pièces principales de la villa servirent de salle de projection. L’une des pièces fut nommée «Marta» et l’autre, bien évidemment, «Cele».

 

FILMOGRAPHIE :

 

1933 - Il caso Haller d’Alessandro Blasetti avec Memo Benassi

1934 - Teresa Confalonieri de Guido Brignone avec Nerio Bernardi

 

 

© Louis AUBERT  pour Les Gens du Cinéma (mise à jour 18/11/2006)